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Joffrey Roqueplan et Frédéric Perrot, deux amis avec des profils assez différents, se sont associés au sein d’une SCOP et ont ouvert une brasserie artisanale, Pied-de-Biche, à Quimaec, dans le Finistère Nord.
Joffrey a une formation (BEP, Bac Pro et BTS) en viticulture et œnologie. Entre ses études et son parcours professionnel, il a évolué pendant une quinzaine d’années dans le domaine du vin. Mais plus intéressé par la transformation du produit que par la réalisation de grands crus, et grâce à un module brasserie au cours de son BTS, il décide de s’orienter vers la fabrication de la bière. C’est à ce moment-là, en 2012, qu’il rencontre Frédéric. Ce dernier, après l’obtention de son Master en géographie, rentre d’un an au Canada où la brasserie artisanale est très développée.
Leurs envies communes les mènent sur le chemin de l’entrepreneuriat. Tous deux travaillent pendant un an au peaufinage de leurs recettes et en profitent pour vérifier qu’ils pourront être à la fois amis et associés.
Leur volonté est de fonder une entreprise humaine et ils créent, en 2014, une SCOP (société coopérative et participative). Ce type de société met l’accent sur la valeur du travail plutôt que sur les valeurs financières (par exemple, la répartition des bénéfices fait passer en priorité la survie de l’entreprise, puis les salariés, puis les associés qui travaillent avant les simples investisseurs). Cela représente pour eux un modèle équitable de société, au sens large.
Pied-de-Biche, le nom de la brasserie, vient d’une expression familière dans leur réseau amical : « ça biche » (qui signifie : c’est bien). C’est aussi un petit clin d’œil à leurs amis libertaires.
La brasserie est installée dans une ancienne forge du village. Afin d’être le moins énergivore possible, elle fonctionne comme dans les temps anciens : le brassage au feu de bois pour n’utilise ni énergie nucléaire, ni pétrochimique et s’interrompt aux premières chaleurs.
Les clients locaux sont fiers d’acheter de la bière de Quimaec. Et les brasseurs travaillent aussi avec des cavistes sensibilisés à la production du vin de manière naturelle et qui sont ravis de voir s’élargir cette éthique à la bière. Les deux associés bénéficient d’un réseau très large, notamment auprès d’organisateurs de festivals auxquels ils fournissent de la bière pour leurs événements. Ils organisent aussi des concerts et spectacles dans leurs locaux.
Les deux associés, bénéficiaires du RSA au moment de la création de leur entreprise, ont pu obtenir un prêt NACRE (à taux zéro).
Joffrey et Frédérique, pour limiter les risques, étaient soucieux d’emprunter le minimum, mais ils ont peut-être visé un peu bas. Aussi, pour financer leurs derniers investissements, ils viennent de mettre en place un financement participatif, un processus très utilisé par les SCOP. Ils ont ouvert 150 titres participatifs à 100 euros chacun. Au bout de 7 ans, les souscripteurs verront leurs titres rachetés. Et d’ici là, ils recevront une rémunération fixe (2 %) et une part variable. L’intérêt de ce système est que peu importe le nombre de titres souscrits, la somme rassemblée sera assimilée aux fonds propres de la société. Ce qui n’est pas le cas avec le crowfunding : si le capital demandé n’est pas atteint, la campagne échoue totalement.
Actuellement, les deux brasseurs se fournissent en céréales en Belgique. Mais ils ont pour projet de fabriquer une bière de terroir. Pour cela, ils envisagent de s’associer avec un agriculteur de la région. Il fabriquerait la matière première qui serait maltée dans les Côtes-d’Armor. L’ensemble de la fabrication serait alors local.